Voyages en France en 1787, 1788 et 1789

Arthur Young – 1792

En 1792, Arthur Young publie en trois volumes le récit des trois voyages qu’il effectue à travers la France entre 1787 et 1789.
Il s’attarde principalement sur la culture, la richesse, les ressources des régions, leurs particularités et leurs activités. Observateur minutieux des techniques agricoles, il l’est également de l’état du réseau routier, des auberges, des mœurs et des mentalités de la société française à l’époque des événements de 1789. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le tableau qu’il dresse des campagnes françaises à la fin de l’Ancien Régime est peu flatteur. Il ne se livre pas proprement à une description du paysage mais s’en rapproche si on le compare à La Fontaine.

C’est en 1787 – à cheval – que le britannique traverse le Limousin. Il commence son périple à Argenton, avant de s’enfoncer dans le Bas‐Berry, de traverser Limoges et de continuer vers le Sud.
Arthur Young semble être un des premiers à relater les attraits du paysage limousin. Compris à travers un regard sensible et esthétique, le Limousin dispose d’un potentiel pictural que les artistes n’ont qu’à exploiter. En entrant dans l’ancien comté de la Marche, dont la capitale est Guéret, il remarque d’ailleurs que « Pour faire de ce site un jardin, rien ne manque que de déblayer les décombres ».

Le pays croît beaucoup en beauté...

5 juin. — Le pays croît beaucoup en beauté ; traversé une vallée, où une chaussée retient l’eau d’un petit ruisseau et l’épanouit en un lac, ce qui forme un délicieux paysage. Ses rives ondulées et bordées de bois sont charmantes ; les collines, des deux côtés, sont à l’unisson ; ce terrain couvert de bruyères, l’œil prophétique du goût pourrait le transformer en une pelouse. Pour faire de ce site un jardin, rien ne manque que de déblayer les décombres.

Vu Limoges...

6 juin. — Vu Limoges et visité ses manufactures. C’était certainement une station romaine ; quelques traces de son antiquité subsistent encore. La ville est mal construite, avec des rues étroites et tortueuses, les maisons hautes et peu plaisantes. Elles sont bâties en granit et en bois, avec des lattes et du plâtre, pour éviter la chaux, article cher ici, car on la fait venir d’une distance de douze lieux ; les toits sont couverts de tuiles ; ils font sa…

Un spectacle extraordinaire...

8 juin. — Un spectacle extraordinaire pour des yeux anglais : de nombreuses maisons, trop bonnes pour être appelées cottages, et qui n’ont pas de vitres. A quelques milles sur la droite est Pompadour, où le Roi a un haras ; il y a là toutes sortes de chevaux, mais surtout arabes, turcs et anglais. Il y a trois ans, on importa quatre chevaux arabes qui furent payés 72 000 livres (3149 livres sterling). Le prix de la saillie n’est que de 3 livres, que l’o…

La beauté du pays...

La beauté du pays, qui, entre Saint‐George et Brive, s’étend sur 34 milles, est si variée, et à tous égards, si frappante et intéressante, que je ne m’attacherai pas à une description particulière ; je ferai observer, en général, que je doute fort qu’il y ait rien de comparable en Angleterre ou en Irlande. Il ne s’agit pas d’une belle vue, qui, de temps en temps, arrête l’œil et compense pour le voyageur la monotonie d’un long parcours, mais bien d’une rapi…