Jean et moi…
Alfred Assollant | François Bûchamor (1873)
Si en ce début de décennie 1790 François Bûchamor déclare enfin sa volonté de se marier à ses parents, c’est aussi le moment qui voit la France révolutionnaire entrer en guerre. Ainsi, un dimanche, le cérémonial de la messe se voit quelque peu bousculé par le « tambour » et l’appel du maire de la commune à s’engager pour défendre la Révolution. L’occasion pour François Assollant de nous présenter longuement l’église de Néoux, et d’inscrire son récit dans une sorte d’intemporalité, de permanence des choses…
L’église de Néoux constitue un véritable repère à de multiples occasions du récit, notamment lors du premier retour au foyer de François Bûchamor après cinq ans de guerre.
L’aîné de la famille choisira de s’engager, pour son honneur, certes, mais surtout pour celui de son nom, de sa famille, bien que son frère puîné, Jean, se soit déjà engagé la veille lors de la foire de Crocq où la nouvelle de la guerre a suscité la vive réaction du maire et des citoyens :
Le maire se mit à chercher ses lunettes. On lui arrache la dépêche. On la lit tout haut. Voici ce qu’elle disait : Que la patrie est en danger et que tous les citoyens sont appelés aux armes ! Que les Prussiens ont passé le Rhin, qu’ils marchent sur Paris.
Tout le monde disait : Ah ! les gueux!. Qu’ils viennent donc ici. On les recevra à coups de fourche. Le maire va chercher son écharpe, fait venir le tambour de la commune, fait battre la générale, rassemble la garde nationale et le conseil municipal, affiche lui‐même le décret de l’Assemblée nationale, pose une planche sur deux tonneaux, une plume, de l’encre et du papier sur la planche. Tout ça a été fait en un quart d’heure. Pendant ce temps le tambour battait toujours la générale. […]
A la fin, quand il a vu que nous étions aussi serrés autour de lui que des épis de blé dans un champ, il a fait signe au tambour de s’arrêter, il a lu le décret de l’Assemblée, et il a dit qu’on allait inscrire les braves citoyens qui voulaient donner leur vie pour la patrie.
Alfred Assollant, François Bûchamor, Éditions Garnier, « Classiques populaires », 1978, 33.